Pour chercher et caractériser les effets environnementaux résultant de cette évolution: flux de matières et de polluants, du bâtiment au sol. Voies d'amélioration techniques et de maîtrise des coûts
Les co-produits issus du traitement des déjections des élevages porcins bretons vont augmenter sensiblement dans les années à venir. Cette évolution va entraîner une modification, sur le territoire breton, de la répartition et de la nature des matières organiques et fertilisantes issues de ces élevages. La recherche s’emploie donc à chercher et caractériser les effets environnementaux résultant de cette évolution. Les travaux de recherche mis en oeuvre par l’INRA de Rennes et le Cemagref concernent le bâtiment d’élevage, les procédés de traitement et le sol récepteur des effluents et co-produits.
L'élevage porcin occupe une place prépondérante dans le programme de résorption des excédents en Bretagne. La résorption est essentiellement assurée par la réduction de l'excrétion d’azote par la voie alimentaire (24,9 % de la résorption réalisée en mai 2006, source DDAF et MIRE de Bretagne), le transfert d'effluents vers des cantons non excédentaires (43,7 % de la résorption réalisée) et par la mise en œuvre du traitement des déjections (24,5 % de la résorption réalisée). Fin 2005 en Bretagne, 326 stations de traitement sont dénombrées dont 76% de stations biologiques à boues activées, correspondant à 83% des volumes traités. 16% des stations soit 6% des volumes sont traités par le compostage (Levasseur et Lemaire, 2006). Près de 500 stations de traitement sont envisagées à terme.
Le gisement de co-produits issus du traitement va donc augmenter rapidement. Un doublement des quantités produites étant envisagé au cours des prochaines années (source MIRE Bretagne). Ces co-produits sont soit valorisés sur les terres de l'exploitation, soit exportés après un compostage sommaire ou repris pour être transformés en fertilisants organiques, dans le cadre de contrats avec des entreprises.
De par les flux de matière concernés, et la part croissante du traitement dans la résorption (les autres voies ayant été explorées en priorité et en passe d'être “épuisées”), la mise en œuvre de ce programme d'action modifie sensiblement la répartition et la nature des matières organiques et fertilisantes issues des élevages sur le territoire breton. Il est donc important de chercher à caractériser les effets environnementaux résultant de cette évolution, ce qui a motivé la mise en œuvre d'un ensemble d'actions de recherche du programme Porcherie verte, concernant le bâtiment d'élevage, les procédés de traitement et le sol récepteur des effluents et co-produits.
Le traitement biologique par nitrification dénitrification en boues activées est un système qui fonctionne et qui permet d'atteindre les objectifs d'abattement d'azote imposés aux éleveurs.
Les objectifs en matière d'abattement de phosphore sont atteints par la mise en place de décanteurs centrifuges en amont du traitement ou de filtration sous vide en aval. Cependant, le système reste coûteux et des questions concernant l'impact sur le milieu sont apparues notamment en matières d'émissions gazeuses (ammoniac et gaz à effet de serre), d'utilisation des produits du traitement (diversité, quantité et qualité microbiologique).
Les travaux du Cemagref ont pour objectifs :
- de réduire les coûts en optimisant le procédé (modélisation, production biologique d'énergie),
- de diversifier les produits exportables (obtention d'engrais phosphatés à partir du lisier),
- de quantifier et de réduire les émissions gazeuses (mesures sur site et développement d'outils de calculs et de comparaisons entre filières),
- d'évaluer la qualité sanitaire des produits exportés et épandus (mesures par méthodes microbiologiques classiques et développement de nouvelles méthodes de biologie moléculaire) pour l'analyse des pathogènes et des traceurs de contamination.
La transformation rapide des déjections a l'avantage de réduire les odeurs liées au stockage des effluents, de profiter des conditions en bâtiment, de réduire l'émission de gaz polluants et faciliter le recyclage de l'eau et des nutriments excrétés. C'est pourquoi des travaux prospectifs dans ce domaine sont conduits à l'Unité Mixte de Recherche Agrocampus Rennes/INRA “Sol- Agronomie-Spatialisation” (UMR SAS) en collaboration avec les Chambres d'Agriculture de Bretagne et les Instituts Techniques.
Nous avons montré que l'élevage de porcs sur litière permettait un abattement d'azote non polluant. Des émissions importantes d'ammoniac (NH3) et de protoxyde d'azote (N2O) ont été observées lorsque la litière est très humide (NH3) ou en litière accumulée brassées (N2O). Toutefois, des émissions polluantes très faibles ont été observées dans un système à faible densité (> 2 m²/porc). Il est donc souhaitable de développer une nouvelle génération de bâtiments alliant économie, ergonomie, faible risque environnemental et bien-être animal.
L'élevage de lombriciens (vers de terre) à l'aval de la porcherie, au sein d'une filière lisier frais, a été mis au point à Guernevez de 2003 à 2005 en collaboration avec des entreprises et scientifiques en France et à l'étranger. Ce système réduit les pollutions gazeuses tout en produisant du lombricompost et des lombriciens. L'adjonction de culture de végétaux aquatiques a permis d'atteindre des concentrations dans l'eau < 5 mg N/l. L'eau apparaît ainsi comme un enjeu de recyclage et comme le vecteur d'éléments nutritifs entre ateliers complémentaires pour produire des animaux et plantes non alimentaires (matériaux, énergie) ou pour l'alimentation animale (plantes, macrofaune) ou pour l'alimentation ou les loisirs (poissons, invertébrés).
Les apports d'effluents et d'issues de traitement sur le sol peuvent conduire à une altération de la qualité des sols, du fait de la persistance éventuelle de pathogènes et de résidus de produits pharmaceutiques, et être à l'origine de flux de substances polluantes vers l'eau (nitrates (NO3), matière organique dissoute) et l'atmosphère (ammoniac (NH3), oxydes d'azote (N2O). Il appartient cependant de prendre en compte la valeur fertilisante des produits organiques pour en établir le bilan environnemental, car leur utilisation permet en effet de réaliser des économies d'engrais minéraux dont la fabrication et le transport sont sources de dépense énergétique et donc émettrices de gaz à effet de serre.
L'approche des effets environnementaux amène également à considérer le court et le long terme, du fait du stockage de matière organique (MO) et d'éléments au fur et à mesure des apports. Les travaux de recherche qui sont réalisés ont pour objectifs :
- d'affiner la valeur fertilisante azotée et phosphatée à court terme des principaux effluents porcins et issues de traitement,
- d'étudier l'intérêt et les limites de l'analyse de composition biochimique des produits porcins pour en caractériser la biodisponibilité en azote et leur valeur en tant qu'amendement organique,
- de caractériser les effets d'apports répétés d'effluents porcins (apports annuels de lisier et de fumier composté, pendant une dizaine d'années) sur le stockage de MO, le fonctionnement du cycle de l'azote (minéralisation, nitrification, lessivage, dénitrification et émission de N2O) et la structure de communautés microbiennes spécifiques du sol.
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