Lors du compostage des effluents d’élevage, les transformations de la matière organique se traduisent par des émissions gazeuses pouvant être préjudiciables à l’environnement. Connaître ces émissions de gaz à effet de serre est utile pour améliorer le bilan environnemental des procédés utilisés.
Lors du compostage des effluents d’élevage, les transformations de la matière organique se traduisent par des émissions gazeuses pouvant être préjudiciables à l’environnement. Hormis la vapeur d’eau, les principaux gaz émis sont CO2 et NH3, mais aussi N2O et CH4 qui sont de puissants gaz à effet de serre. Connaître ces émissions est utile pour améliorer le bilan environnemental des procédés utilisés. Ainsi, deux types d’expérimentation ont été menés et sont relatés dans ce rapport. Le premier type concerne le procédé de compostage de lisier de porcs sur paille de blé, pratiqué selon la méthode Guernévez®. L’expérimentation a été conduite sur le site de l’EDE à Guernévez afin d’acquérir des références complètes sur les pertes gazeuses, incluant toutes les phases du compostage et de réaliser un bilan des éléments chimiques pour ce procédé de transformation du lisier. Le compostage a été réalisé en suivant scrupuleusement la méthode référencée grâce à la participation directe de l’EDE aux essais. Trois apports de lisier sur la paille (environ 10, 3, puis 2 m3 de lisier/t de paille) ont été réalisés à J0, J16 et J28, respectivement. Chacun des apports est constitué de plusieurs séquences séparées par un malaxage avec un Rotavator®. Cette première phase a été réalisée en couche de faible épaisseur (45 cm environ). A J70, le fumier ainsi produit a été mis en andain de 1 m de hauteur environ. Durant ces deux phases, les mesures ont concerné : (1) les émissions gazeuses par la méthode de traçage nécessitant l’utilisation d’un échantillonneur-doseur de gaz traceur (SF6), d’un analyseur de gaz (CO2, CH4, NH3, N2O, H2O), d’un système d’homogénéisation de l’air ambiant dans la serre servant d’abri de compostage, d’un dispositif de mesures météorologiques complet à l’extérieur et d’enregistrement de la température et de l’humidité de l’air à l’intérieur de la serre, (2) les températures en 9 points dans le tas en compostage, (3) les volumes, densités et masses de matières brute, sèche et les teneurs en éléments chimiques à différentes dates (J0, J16, J28, J70, J126, J182). Dans ce type de compostage en couche de faible épaisseur durant la phase d’imprégnation (70 j), ainsi qu’après la mise en andain, les températures restent modérées (maximum de 45°C), ce qui ne permet pas l’hygiénisation du compost produit. Les émissions d’ammoniac interviennent juste après les épandages de lisier (J0, J16 et J28) et s’interrompent rapidement ; celles de CO2 démarrent aussitôt l’épandage et se poursuivent, tout en diminuant durant toute la phase d’imprégnation et un peu après la mise en andain ; celles de CH4 sont concomitantes aux émissions de CO2 mais régressent beaucoup plus rapidement ; enfin, celles de N2O démarrent lorsque les émissions d’ammoniac ont cessé et que celles de CH4 ont commencé à diminuer. Un bilan a pu être établi avec une méthode simplifiée basée sur les rapports de concentrations en gaz et les rapports C/N des pertes au tas et des gaz mesurés. Pour toute la durée du compostage comprenant la phase d’imprégnation en couche peu épaisse et la maturation en andain, 65% du carbone apporté au tas est émis vers l’atmosphère, dont 57% sous forme de CO2, 6% sous forme de méthane et 2% sous forme de composés organiques volatils (estimation), 60% de l’azote apporté au tas est émis vers l’atmosphère, dont 6% sous forme de N2O, 10% sous forme de NH3 et 44% sous forme de N2. Dans ce type de compostage, la nitrification et la dénitrification, ainsi que l’organisation de l’azote par la biomasse microbienne semblent être des processus majeurs. Le produit obtenu est très riche en éléments fertilisants. Son épandage devra donc être particulièrement bien raisonné selon les besoins des cultures. L’étude de l’évolution du matériau à différentes profondeurs a montré un fonctionnement en bi-couche, avec nitrification et organisation de l’azote dans la couche supérieure aérée et plus sèche, et dénitrification et ammonification dans la couche profonde humide. Cette expérimentation a également permis de progresser dans la méthodologie de mesures des émissions gazeuses en conditions de terrain, notamment en ambiance extérieure. Elle a comparé une méthode par gaz traceur à une méthode simplifiée utilisant le bilan de masses et les rapports de concentrations en gaz mesurées avec un analyseur multi-élémentaire.
Le second type d’expérimentation concerne les essais en pilotes dans la halle expérimentalle de l’INRA de Rennes. Ces essais ont pour objectif de construire et paramétrer un modèle générique des émissions gazeuses intervenant lors du compostage des effluents d’élevage. Quatre expérimentations ont été conduites dans des cellules isolées et régulées en température qui permettent de mesurer tous les flux de gaz émis par un tas de compost. Ces expérimentations avaient pour objectif de modéliser les émissions gazeuses en fonction des principaux paramètres de contrôle du compostage que sont la disponibilité de l’azote, la biodégradabilité du carbone, la porosité libre à l’air et l’humidité. Huit tas, couvrant une large gamme de disponibilité de l’azote et de biodégradabilité du carbone, ont été suivis durant 2 mois correspondant à la première phase du compostage responsable de la quasi totalité des gaz émis. Huit autres tas, couvrant une large gamme de porosité libre à l’air et d’humidité, ont également été suivis durant une période analogue. Pour la première série, les cinétiques d’émissions observées dépendent des substrats et de la flore présente. Pour le CO2, le pic d’émission est rapide et élevé en présence de carbone biodégradable et d’une flore active dès la mise en tas (fumier notamment), il est retardé et étalé si le carbone est peu biodégradable. Significativement différentes au démarrage, les quantités émises tendent à converger avec le temps. Pour l’ammoniac, de la même manière, le pic d’émission est élevé en présence de carbone très biodégradable et étalé si le carbone est moins biodégradable ; la hauteur du pic dépend principalement du carbone biodégradable et de la flore présente initialement ; la durée du pic d’émission dépend principalement de la quantité d’azote disponible. Les émissions de protoxyde d’azote et de méthane sont faibles. Les émissions cumulées d’ammoniac dépendent du carbone biodégradable et de l’azote disponible. Lorsque le carbone est très biodégradable, elles sont réduites. L’importance de l’immobilisation comme flux concurrent de la volatilisation est mis en évidence. Des équations de prédictions ont pu être établies pour expliquer les émissions de CO2 par la teneur en éléments solubles et hémicellulose dans la MS (fractionnement Van Soest) et de NH3 par la teneur en azote soluble dans l’eau et la teneur en éléments solubles et hémicellulose dans la MS. La seconde série montre que la porosité libre à l’air est un paramètre déterminant : sa réduction par tassement ou ajout d’eau réduit les émissions fortement. L’humidité est plus difficile à appréhendée séparemment car elle influence directement la porosité libre à l’air. Des équations permettent de prédire la perte d’eau du tas avec la teneur en éléments solubles et hémicellulose dans la MS (fractionnement Van Soest), la teneur en azote soluble dans la MS, la densité de MS et le rapport eau/MS. L’émission de CO2 est prédite par la teneur en éléments solubles et hémicellulose dans la MS (fractionnement Van Soest), la densité de MS et le rapport eau/MS. L’émission d’ammoniac peut être expliquée par la densité de MS, le rapport eau/MS, la teneur en éléments solubles et hémicellulose dans la MS (fractionnement Van Soest) et la quantité de glucides solubles dans la MS. Ce dernier critère rend compte d’une dégradabilité à très court terme du carbone, essentielle pour mieux différencier les émissions d’ammoniac dans une gamme variée de situation de compostage d’effluents d’élevage. Le marquage 15N au centre de 2 tas a montré l’importance des flux d’éléments au sein du tas, principalement liés à la diffusion dans les gaz et dans l’eau. Seulement 3% du marqueur a été retrouvé dans le filet « marqué ». Le marqueur est retrouvé surtout dans la sphère proche et au-dessus, mais également en dessous. De façon moindre, mais significative, on retrouve également le marqueur aux extrémités latérales du tas, signifiant que la diffusion a vraisemblablement eu lieu dans l’ensemble du tas.
Mots Clés : Compostage, effluents d’élevage, lisier de porc, températures, émissions gazeuses, (ammoniac, gaz carbonique, protoxyde d’azote, méthane), bilan matières, éléments chimiques, prédiction des émissions gazeuses (azote disponible, carbone biodégradable, porosité, humidité).
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