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Marc Fouéré
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Marc Fouéré est un ancien journaliste de Porc Magazine et de la Semaine Vétérinaire.
Reportage à Madagascar : un pro du porc
Le témoignage d'un journaliste spécialisé plongé dans l'univers de l'élevage porcin à Madagascar
Au bout de la piste défoncée un portail orange et un mur de maçonnerie se détachent sur l'horizon. Le passage de ce portail me fait l'effet d'une téléportation: au dehors, divagation des animaux, génétique douteuse et faible conformation ; à l'intérieur de l'enceinte : ordre, rigueur et hygiène dominent. Dès l'ouverture je suis accueilli avec un seau de désinfectant pour mes mains et mes chaussures : le ton est donné, je suis entré dans un élevage malgache d'exception.
Démarrage dans des conditions difficiles
Lorsqu’Andry Ranaivomanana se lance dans la production porcine en 2001, l'épidémie de Peste Porcine Africaine vient de décimer le cheptel malgache. Autant dire qu'il n'a pu compter que sur lui même. Un à un, tous les organismes bancaires ou de microcrédit ont refusé de le soutenir dans son projet d'installation : tous ces organismes considèrent désormais l'élevage de porcs comme un élevage à risque et lui refusent tout financement. L'éleveur a donc commencé seul et à petite échelle dans la banlieue de Tananarive. Ce furent d'abord trois truies puis sept. En 2004, cet autodidacte maîtrise l'élevage du naissage à l'engraissement bien mieux que ne le fait la grande majorité de ses compatriotes. Pour se former, il s'est plongé dans les livres et a reçu quelques formations auprès d'organismes tels que la Maison du Petit Elevage. Conforté dans ses compétences, il décide de franchir une étape et de passer à la vitesse supérieure. Pour augmenter son cheptel jusqu'à 25 truies et maintenir un statut sanitaire suffisant, il prend la décision de quitter sa petite ferme des faubourgs de la capitale pour trouver plus grand ailleurs. Il va s'établir à une trentaine de kilomètres de Tana. Une fois le terrain choisi son premier investissement consiste à construire une palissade de brique qui ceinture son élevage. Le voici à l'abri des contaminations par les porcs ou les potamochères qui divaguent trop nombreux dans la campagne environnante.
Rigueur et hygiène à tous les étages
Après s'être protégé des incursions extérieures, Andry Ranaivomanana a entrepris la construction des différents bâtiments de son élevage naisseur-engraisseur de 25 truies. Les plans des bâtiments et l'organisation globale de l'élevage sont très classiques, ils correspondent aux plans-type des bâtiments proposés par le CITE (centre de documentation des entreprises de Tananarive). Les fondamentaux sont respectés : orientation et répartition des bâtiments en fonction des vents dominants, séparation des différentes phases d'élevage, ventilation à lanterneaux. La conception des bâtiments est guidée par deux maître-mots : hygiène et confort des animaux. Dès l'entrée dans l'enclos muré de l'élevage on remarque immédiatement que la cour est parfaitement et régulièrement balayée, rien ne traîne. Dans les bâtiments le sentiment est le même. Les gisoirs pleins en béton sont impeccables de même que les cochons. Pour y parvenir chacune des cases est nettoyée deux fois par jour. Un pédiluve équipe chacune des entrées des bâtiments. L’éleveur a préféré la qualité au tape-à-l’œil, les matériaux sont locaux, briques, bois, chaume. Pour préserver le confort thermique nécessaire aux reproducteurs, l’éleveur a opté pour une couverture traditionnelle en chaume du bâtiment gestantes. En revanche, il a choisi la tôle ondulée pour les autres bâtiments. Ce matériau présente l'intérêt d'être imputrescible et de ne pas faire le délice des rongeurs. L’éleveur a commencé à intégrer certaines notions de bien-être animal à son fonctionnement, A titre d'exemple, les cases de maternité sont équipées de barres anti-écrasement. D'autre part, il distribue régulièrement des feuilles aux animaux. Cela distrait les porcs et tout le temps qu'ils passent à mâchouiller ces feuilles ils ne s'attaquent pas aux queues de leurs congénères. Ce « système D » associé à une bonne gestion de l'ambiance en bâtiment donne ne bons résultats : lors de la visite, aucun des animaux ne présentait de traces de morsures.
Un raisonnement d'entrepreneur
Contrairement à la grande majorité des éleveurs malgaches Andry Ranaivomanana raisonne la gestion de son élevage comme un entrepreneur. Par exemple, il fait varier la formulation de ses aliments en fonction des cours des matières premières sur le marché local. Cette approche lui permet de gérer au mieux le compromis qualité de l'aliment/Charges alimentaires. Il prépare une gamme de quatre aliments (Truie nourrice, Croissance, Engraissement, 1er et 2e âge). La formulation moyenne de base associe le maïs (50%) au manioc (20%) et au son de riz (10%). En raison de la présence de cyanure, le manioc, quoique bon marché, ne peut être incorporé à plus de 20%. L'éleveur investit aussi dans l'adjonction de CMV [Complément Minéraux et Vitamines, ndlr]. Il incorpore aussi des tourteaux de soja et de la farine de poisson à l'aliment croissance. Ne disposant pas de l'électricité, il fait broyer les matières premières hors de la ferme puis fait les mélanges lui même. Lors de la création de son nouvel élevage, Andry Ranaivomanana a investi dans le potentiel génétique. Toutes les truies ainsi que le verrat (de race Large White) sont des descendants directs des animaux importées de la réunion en 2002. Les truies sont conduites par bandes de cinq. La présence d'un verrat à l'intérieur de l'élevage évite les risques de contamination et permet d'avoir recours à la monte naturelle.
Des résultats impressionnants
Les résultats de cet élevage naisseur-engraisseur de 25 truies sont à la hauteur du professionnalisme de l'éleveur et de la qualité de l'investissement réalisé. Les résultats de reproduction sont particulièrement éloquents. Grâce à une conduite rigoureuse, à la maîtrise de la fécondation ainsi qu'à une génétique et des bâtiments de qualité, le nombre moyen de nés-vifs par portée est de 14. L'éleveur sèvre, en moyenne, 13 porcelets par portée et ses truies font 2,4 portées par an. Peu après la naissance, tous les porcelets ont les dents coupées et ils reçoivent une injection de fer à 3 puis à 21 jours. La castration est systématique à 15 jours. Sevrés à 5 semaines, les porcelets passent ensuite un mois en post-sevrage. Le professionnalisme de l'éleveur peut aussi s'observer sur la gestion du chargement. Comme l'engraissement a été conçu pour accueillir 180 animaux, tous les porcelets supplémentaires sont vendus à 10-11 kg. Andry Ranaivomanana vend les porcs qu'il engraisse lui-même à une centaine de kg au bout de 5 mois d'engraissement. Grâce à la qualité et à l'homogénéité de sa production, l'éleveur a réussi à fidéliser un boucher qui lui achète toute sa production en vif à un prix supérieur à la moyenne du marché. Andry Ranaivomanana se projette déjà vers l’avenir. S'il doit s’agrandir les conditions sanitaires guideront son choix. Il partira plus loin dans une zone moins dense et créera peut-être une organisation en multi-site.
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